Au vu des nouvelles réglementations et des business models qui évoluent, 2019 sera une année charnière dans le monde pour le secteur financier. Nos responsables régionaux partagent leurs prévisions et leurs idées pour 2019
Philippe Benoît, Responsable région Asie-Pacifique
La Chine continuera à s'ouvrir et à rechercher de nouveaux partenariats
La Chine a poursuivi ses efforts pour libéraliser ses marchés de capitaux et accroître ses investissements. Les systèmes existants devraient connaître une croissance substantielle en 2019 à mesure qu'ils seront améliorés. La Chine continuera également à établir de nouveaux partenariats, probablement sous différents modèles, avec d'autres pays. Parallèlement au lancement et au développement du lien Shanghai-Londres Stock Connect, nous ne devons pas exclure le lancement de programmes avec d'autres pays, comme l’Australie, avec lesquels la Chine entretient des liens stratégiques.
Les mécanismes de passeport financier vont stimuler les flux de capitaux transfrontaliers
La volonté de la Chine d'ouvrir ses marchés est l'une des raisons pour lesquelles les flux de capitaux transfrontaliers entrant et sortant des marchés de l'Asie-Pacifique vont s'accélérer en 2019. La Chine n’est pas la seule à influencer la tendance. L’Asia Regional Funds Passport (ARFP) devrait être lancé à partir de février 2019, reliant les marchés des fonds en Australie, au Japon, en Corée, en Nouvelle-Zélande et en Thaïlande. Nous prévoyons également une convergence avec l’ASEAN’s Collective Investment Scheme (CIS), qui suscite un intérêt croissant de la part des acteurs du secteur. Cela apporterait un plus grand nombre d'actifs sous gestion (AUM) aux gestionnaires de fonds, faisant du système ARFP un concurrent régional potentiel des OPCVM en Asie.
L'externalisation du traitement post-transaction va s'accélérer
À mesure que les divers marchés de l’APAC modifient leurs infrastructures commerciales et que les nouvelles réglementations et technologies transforment les pratiques de clearing et de règlement-livraison, le third-party clearing(TPC) deviendra probablement une option plus attrayante. Dans le contexte extrêmement concurrentiel actuel, le sell-side a besoin de la capacité d’investir dans ses compétences essentielles (recherche, trading et exécution) et de différencier ses offres. Le third-party clearing leur offre un moyen de le faire en réduisant les coûts fixes, en optimisant le capital et les liquidités et en améliorant l'agilité, de sorte que sa popularité continuera à s’accroître dans la région en 2019.
Claudine Gallagher, Responsable région Amérique
Les gestionnaires d'actifs américains continueront d'analyser les opportunités d'efficacité dans leurs middle/back offices
Alors que les gestionnaires de placements américains adaptent leurs business models à un environnement en évolution (réduction des frais de gestion, difficultés de génération d'alpha, surveillance réglementaire accrue, infrastructure d'exploitation vieillissante), nous prévoyons que nombre d'entre eux ajusteront leur approche des services post-transaction et adopteront plus largement le concept d’outsourcing.
Selon un rapport de McKinsey & Company, les coûts d’exploitation et de technologie des gestionnaires d’actifs en Amérique du Nord ont presque doublé de 2007 à 2016. Garder le rythme continuera d'être plus coûteux en argent et en temps pour les gestionnaires d'actifs. Par conséquent, l'automatisation et l’outsourcing des opérations d'investissement, sur le plan middle/back office, seront encore plus attrayants.
Les ETF continueront à gagner des parts de marché
Nous prévoyons que, sur l'ensemble du continent américain, les investisseurs institutionnels augmenteront leur allocation sur les ETF à mesure qu'ils se familiariseront avec la liquidité de cette classe d'actifs. De plus, nous constatons que les types d’ETF proposés continueront d’innover, car les gestionnaires d’actifs recherchent toujours de nouveaux moyens d’innover, de se différencier et de distribuer leur produit.
Les gestionnaires de hedge funds devront réajuster leurs modèles pour faire face à la volatilité accrue du marché
Au cours des dernières années, les hedge funds ont dû adapter leurs modèles pour rechercher des opportunités décroissantes d'alpha au cours d'une période de volatilité historiquement basse et stagnante (à quelques exceptions près de courte durée). Cependant, depuis le début du quatrième trimestre de 2018 et vraisemblablement en 2019, la volatilité revient non seulement sur les principaux marchés boursiers, mais également sur les marchés obligataires, des changes et des produits de base (notamment le gaz naturel et le pétrole brut). Nous pensons que 2019 servira de test pour voir quels gestionnaires de fonds de couverture peuvent ajuster leurs stratégies avec succès pour rester performants dans ce nouvel environnement de volatilité accrue.
Les assets owner d’Amérique latine se diversifient au-delà des frontières
Les allocations transfrontalières des fonds de pension d'Amérique latine et des institutions officielles devraient, après quelques années de croissance soutenue, augmenter encore. Les fonds de pension brésiliens, en particulier, recherchent activement de nouvelles opportunités pour diversifier leurs stratégies d'investissement au-delà des actifs nationaux.
Nous constatons également que les compagnies d’assurance poursuivent leur recherche de rendement en Amérique latine. Nous considérons cette croissance dans le contexte de la consolidation du marché, de la désintermédiation par des canaux non traditionnels et des difficultés permanentes à se conformer à des cadres réglementaires locaux plus stricts.
Alessandro Gioffreda, Responsable région Europe continentale
Plus de collaboration pour répondre à un marché en évolution rapide
Les dernières années ont représenté un âge d'or pour l'innovation au sein des entreprises. Ces dernières ont mis au point des moyens pour créer de la valeur pour leurs clients et aborder l’innovation. Alors que les marchés continuent d'évoluer rapidement, les institutions financières devront garder le même rythme, car même une approche de « suiveur rapide » est devenue très risquée.
Dans ce contexte et compte tenu des contraintes qui pèsent sur le développement en interne, les institutions financières devraient de plus en plus chercher à collaborer avec leurs pairs et les entreprises informatiques pour développer de nouvelles propositions de valeur et des solutions innovantes en combinant capacités et ressources.
Les gestionnaires d'actifs et les banques doivent progresser dans l'harmonisation de leur modèle opérationnel
Les défis de rentabilité dus aux exigences réglementaires croissantes et à la pression concurrentielle sur les frais obligent les gestionnaires d'actifs et les institutions financières à revoir leur modèle opérationnel. En Europe, une structure fragmentée et spécifique à chaque pays a empêché de nombreuses entreprises d'atteindre le niveau souhaité d'efficacité et d'optimisation des coûts, ainsi que de fournir un service harmonisé aux clients.
La pression sur les coûts, qui devrait rester élevée, incitera peut-être aussi bien les gestionnaires d’actifs que les banques à harmoniser leur modèle opérationnel et à évaluer plus concrètement les opportunités de sous-traitance. Sur certains segments du marché, les changements d’infrastructures apportent progressivement une normalisation transnationale qui permet aux entreprises de s’appuyer sur des fournisseurs régionaux post-transactions.
Les plateformes de distribution de fonds vont poursuivre leur croissance à deux chiffres et se consolider
Le marché européen des plateformes de fonds interentreprises a atteint 2,4 millions d’euros en 2017 et devrait augmenter à hauteur de 15,8 % du TCAC jusqu'en 2021 pour atteindre un montant de 4,3 millions d’euros d’actifs administrés (AUA). Les principaux facteurs sont la croissance attendue du secteur des fonds communs de placement ainsi que de nouveaux clients, tels que les fonds de pension, nécessitant des services à partir de plateformes de fonds. En outre, les besoins et l’ampleur des investissements entraînent déjà une consolidation du marché avec 4 opérations de fusion et acquisition (M&A) annoncées en 2018.
Cette tendance devrait se maintenir au cours des prochaines années, ne laissant qu'un petit nombre de plateformes sur le marché. Les gagnants seront les plateformes capables de réduire les coûts, d'accroître l'efficacité et de proposer une vaste proposition de valeur aux distributeurs et aux gestionnaires d'actifs de toute l'Europe.
Patrick Hayes, Responsable Région R.-U., Moyen-Orient et Afrique du Sud
Brexit
Quel que soit le résultat final des négociations sur le Brexit, nous nous attendons à ce que Londres conserve sa place de pôle financier mondial en 2019. Des programmes tels que Londres-Shanghai Stock Connect en témoignent. Après plus de 150 ans d'expérience au Royaume-Uni, BNP Paribas est idéalement positionné pour accompagner les clients dans le Brexit et offrir une expertise unique à ceux qui souhaitent développer leurs activités au Royaume-Uni mais également depuis ou vers le Royaume-Uni.
Diversité et égalité
Nous attendons et nous espérons voir une plus grande collaboration au sein de la communauté des services financiers du Royaume-Uni afin de résoudre les problèmes de diversité et d'égalité. Bien que des progrès aient été réalisés, il reste problématique d'attirer, de retenir et de promouvoir les talents féminins dans notre secteur ; pour résoudre ce problème, nous allons devoir collaborer. Avec une Directrice Générale à sa tête au Royaume-Uni, BNP Paribas ouvre la voie, mais nous savons que nous devons faire plus.
Centre d'innovation numérique
En 2019, Londres continuera à bâtir sa réputation de centre d'innovation numérique. Les sociétés de services financiers vont doubler leurs efforts pour recruter en dehors de leur réservoir de talents traditionnel, en étant de plus en plus en concurrence avec les géants de la technologie pour trouver les candidats les plus brillants en matière d'innovation. Nous verrons de nouveaux investissements dans des programmes de type « incubateur » qui orienteront les modèles opérationnels de l’avenir, augmenteront l’efficacité, réduiront les coûts et permettront de générer une nouvelle expérience client améliorée.
Changer les façons de travailler
Pour que les services financiers du Royaume-Uni continuent à prospérer, nous devons reconnaître que les objectifs, les aspirations et les perspectives de carrière des meilleurs talents actuels sont très différents de ceux d’il y a 20 ans. Alors que notre secteur dépend de plus en plus de l'innovation technologique et de la science des données, nous sommes en concurrence avec les géants de la technologie et les nouvelles entreprises pour attirer les talents les plus brillants. Les méthodes de travail flexibles, les dernières technologies, l'acceptation de l'échec dans le processus d'innovation font partie des attentes de cette génération – mais ne sont pas des caractéristiques typiquement associées au secteur bancaire. 2019 sera une année où nous devrons travailler davantage pour changer cette perception.