Perspectives réglementaires de l’UE : tendances dans le secteur du post-marché

Quelles sont les tendances réglementaires qui façonnent le secteur du post-marché dans l’Union européenne ?

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Dans les années à venir, les responsables politiques de l’Union européenne devront adapter leurs efforts réglementaires aux défis qui s’annoncent, dont en particulier l’inflation et les perspectives de récession économique. Alors que l’Union européenne est déterminée à relancer la croissance, notamment grâce à ses ambitieux programmes liés à la finance durable et à la finance numérique, il semble que les responsables politiques s’orientent vers moins de flexibilité en matière d’équivalence et de coopération internationale.

Relancer la croissance de l’UE

Dans le cadre de son initiative phare visant à créer une nouvelle Union des marchés de capitaux (CMU 2.0) et à faire circuler les investissements et l’épargne dans l’ensemble de l’UE, la Commission européenne s’est concentrée sur la finance durable et la finance numérique.

La finance durable dans l’Union européenne

La finance durable est une priorité essentielle de la Commission européenne. Plusieurs textes importants ont été adoptés : la taxonomie de l’UE relative aux activités économiques durables sur le plan environnemental, un règlement sur les informations relatives aux investissements durables et aux risques de durabilité, ainsi qu’une directive ayant trait aux rapports sur le développement durable des entreprises.

En juillet 2022, la Commission européenne a officiellement adopté les normes techniques de réglementation consolidées (RTS) du règlement sur la publication d’informations en matière de durabilité dans le secteur des services financiers (SFDR) et le règlement de la taxonomie de l’UE. L’acte délégué complémentaire relatif aux objectifs climatiques inclut certaines activités des secteurs du gaz et du nucléaire dans la taxonomie climatique. Ceux-ci ont commencé à s’appliquer en janvier 2023.

La Plateforme sur la finance durable (PSF) a également proposé une liste d’activités économiques durables et leurs critères de sélection associés pour soutenir la prévention de la pollution, l’économie circulaire, la protection des ressources marines et des écosystèmes sains. Après une période de consultation par la Commission qui s’est terminée le 3 mai 2023, la publication au Journal Officiel de ces actes délégués est prévue pour le 3e trimestre 2023, avec une mise en application au 4e trimestre 2024.

La finance numérique dans l’Union européenne

La finance numérique est primordiale dans l’agenda réglementaire de la Commission européenne. Les responsables politiques s’engagent ainsi à mettre en place un cadre réglementaire complet relatif aux crypto-actifs d’ici 2024.

Le Règlement sur un régime pilote DLT est déjà entré en vigueur et mis en application le 23 mars 2023. Pour les acteurs du marché, le régime pilote est crucial pour expérimenter le dispositif d’enregistrement électronique partagé (DEEP) car il leur permettra de demander certaines exemptions réglementaires afin de faciliter le développement d’infrastructures de marché DLT. L’expérimentation est essentielle pour faciliter la transition vers des instruments financiers tokenisés et des infrastructures de marché DLT et renforcer la compétitivité mondiale de l’UE grâce à des processus rationalisés.

En France, les trois autorités financières (l’autorité de contrôle prudentiel et de résolution (ACPR), la Banque de France et l’autorité des marchés financiers (AMF) ont précisé les conditions d’instruction des dossiers de projets d’infrastructures de marché DLT. Régime pilote : l’ACPR, la Banque de France et l’AMF précisent les conditions d’instruction des dossiers de projets d’infrastructures de marché DLT | AMF (amf-france.org)

Le règlement sur les marchés de crypto-actifs (MiCA) est entré en vigueur le 29 juin 2023, avec une mise en application graduelle entre le 29 juin 2023 et le 30 décembre 2024. L’objectif du règlement MiCA est d’apporter une sécurité juridique aux crypto-actifs non réglementés et qui n’entrent pas dans le champ des instruments financiers (par exemple les jetons utilitaires, les stablecoins constitués de jetons de monnaie électronique ou de jetons de référence d’actifs) en fournissant des exigences harmonisées aux émetteurs de crypto-actifs et aux fournisseurs de services sur crypto-actifs souhaitant demander une autorisation pour fournir des services dans l’UE.

Il est à noter que la france a instauré un cadre pour les levées de fonds par émission de jetons (Initial Coin Offering ou ICO) et les prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) par la loi PACTE de 2019. Le régulateur français prépare la transition vers le régime MICA. Prestataires de services sur actifs numériques : de PACTE à MiCA – Point presse | AMF (amf-france.org)

Le règlement sur la résilience opérationnelle numérique (DORA) a été publié au Journal officiel le 23 décembre 2022. Le règlement DORA vise à promouvoir des marchés plus sûrs. Les entreprises de « crypto » seront pleinement soumises à ses exigences, en particulier en ce qui concerne la gestion des risques, les piratages et les défaillances technologiques.

La Commission européenne a publié une proposition visant à établir un euro numérique le 28 juin 2023. De nombreux détails manquent encore quant à ses caractéristiques et à sa fonction, mais le résultat de la phase d’enquête de deux ans, menée par la Banque centrale européenne à l’automne 2022, devrait être publié prochainement.

Équivalence et coopération internationale

Le secteur de la compensation illustre parfaitement la manière dont l’UE semble de moins en moins flexible sur certaines questions. Maintenant que le Royaume-Uni a quitté l’Union européenne, celle-ci s’efforce de faire en sorte que les activités de compensation des produits dérivés libellés en euros soient transférées vers des contreparties centrales (CCP) situées au sein de l’UE. L’objectif est de réduire sa dépendance à l’égard des CCP basées au Royaume-Uni, comme l’illustre le réexamen en cours du règlement EMIR.

La Commission européenne a proposé le 7 décembre 2022 un réexamen du règlement EMIR (EMIR 3.0) afin de rendre la compensation de l’UE plus attractive. Le réexamen vise également à réduire l’exposition des institutions financières de l’UE aux contreparties centrales extérieures à l’UE. La proposition contient notamment des mesures prescriptives, telles que l’obligation de détenir un compte actif obligatoire auprès d’une contrepartie centrale de l’UE, mais aussi des incitations, telles que les charges en capital. L’Autorité bancaire européenne (ABE) et le Comité européen du risque systémique (CERS) ont souligné que des mesures prudentielles devaient être prises contre les expositions excessives aux CCP Tier 2. Permettre aux deux CCP Tier 2 britanniques de continuer à offrir des services de compensation dans l’UE après 2025 est considérée comme un élément positif à la fois par l’ABE et le CERS. Cette revue du règlement EMIR comprend également certaines améliorations techniques de la réglementation existante.

L’UE a clairement indiqué que la prolongation accordée, permettant aux banques d’effectuer des transactions par l’intermédiaire de certaines CCP britanniques est temporaire et qu’elle ne devrait pas se poursuivre après 2025. Des frais plus élevés pour les entreprises qui ne se conforment pas à la localisation dans l’UE seront instaurés. Cela implique une augmentation potentielle des coûts de conformité et des défis opérationnels pour les acteurs du marché opérant dans les deux juridictions.

La reconnaissance des CCP de pays tiers est également d’actualité pour les acteurs du marché. Malgré des progrès significatifs au cours des derniers mois concernant (i) les décisions d’équivalence prises par la Commission européenne sur les juridictions clés et (ii) la reconnaissance par l’ESMA des CCP de pays tiers, certaines d’entre elles ne sont toujours pas reconnues. Une moindre flexibilité en matière d’équivalence et de coopération internationale pourrait expliquer pourquoi certaines CCP ne sont toujours pas reconnues – en particulier en Inde et en Turquie – avec d’éventuels effets négatifs importants pour les acteurs du marché (y compris européens) et les pays où les CCP sont implantées.

Les États-Unis et d’autres juridictions (p. ex. le Canada, l’Inde, etc.) passent à un cycle de règlement à un jour (T+1). Dans l’UE, le cycle de règlement actuel pour la plupart des transactions est de deux jours ouvrés (J+2). Bien qu’une transition vers un cycle de règlement plus court pourrait entraîner une réduction des risques et des coûts de marché, le secteur se méfie de la pression que cela pourrait exercer sur les opérations post-marché, notamment pour les participants internationaux. La question est maintenant de savoir si d’autres juridictions, telles que le Royaume-Uni ou l’UE, pourraient également décider d’adopter un règlement à T+1, compte tenu des principaux avantages et des principaux défis, notamment en termes de complexité opérationnelle et d’obstacles à surmonter avant la migration. Une telle analyse pourrait être difficile à réaliser sans une consultation de l’ensemble du secteur pour identifier et quantifier tous les défis associés.